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Et si je souffre, comment faire ?

Les hommes gays et bisexuels peuvent traverser des épisodes de déprime et de dépression. Comment trouver de l’aide ou du soutien psychologique quand on souffre ? Éléments de réponse.

Temps de lecture : 7 min
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Les points à retenir

  • Les personnes LGBT+ ont plus de chances de souffrir de dépression ou d’avoir des pensées suicidaires que les hétérosexuels.
  • Si on souffre, en parler à des proches ou à des professionnels est essentiel. 
  • Des associations LGBT+ peuvent vous conseiller ou vous orienter vers des professionnels spécialisés si vous êtes en souffrance.

Selon une étude récente de Santé publique France, les personnes lesbiennes, gays et bisexuelles sont plus concernées par les troubles de santé mentale : le risque d’épisode dépressif, de pensées suicidaires ou de tentative de suicide est multiplié par deux par rapport aux personnes hétérosexuelles¹. 

La santé mentale des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) est un sujet de préoccupation important. David Friboulet, psychothérapeute et sexologue, répond à nos questions sur le sujet et donne des pistes pour aider ceux qui en auraient besoin.

Comment définit-on une bonne santé mentale ?

Avant de parler de ce que l’on doit faire quand ça ne va pas, définissons déjà quand « ça va » ou, en d’autres termes, ce qu’est une bonne santé mentale. 

Pour le psychothérapeute et sexologue David Friboulet, « une bonne santé mentale peut se définir par le fait de ressentir que l’on se sent bien dans sa vie relationnelle, affective et sexuelle, qu’on a une juste place dans la société et dans son entourage, et que l’on est reconnu pour ce que l’on est ».

« Cet état de bien-être permet de se réaliser, mais aussi de faire face aux difficultés naturelles de la vie avec des stratégies d’adaptation qui permettent à la personne d’être en accord avec elle-même et en lien avec les autres », ajoute le thérapeute, qui souligne que les choses peuvent changer : « Cet alignement de ses actions avec ses pensées et ses émotions peut être fragilisé par des événements de vie ou des épreuves de construction identitaire. » 

Comment dire « je souffre » à quelqu’un ? 

L’une des difficultés, lorsque l’on souffre, est déjà de pouvoir en parler à quelqu’un. Pas simple, confirme David Friboulet, « car la personne qui souffre a souvent honte de souffrir et de ne plus être en capacité d’occuper sa place parmi ses proches. Et puis, ce mot de “souffrance” est compliqué à expliquer, car on peut y mettre beaucoup de choses, et s’il est lié à la difficulté de vivre son orientation sexuelle, la honte est encore plus forte ».

Mais, selon David Friboulet, il suffit d’une seule personne avec qui on peut être soi-même pour se sentir un peu moins vulnérable. « Comme si “ne pas aller bien” n’était plus une faute, mais juste un état universel à traverser, et que demander de l’aide ou déjà de l’écoute était la première chose à faire pour commencer à s’en sortir », explique le thérapeute, qui ajoute : « Dire “J’ai besoin de ta présence ou de ton aide”, c’est déjà beaucoup… »

 

Dire « J’ai besoin de ta présence ou de ton aide », c’est déjà beaucoup… 

David Friboulet psychothérapeute et sexologue

 

Quels sont les signes de la dépression ?

D’abord, il faut différencier la dépression de la déprime, qui, en général, ne dure que quelque temps et est moins profonde. Pour parler de dépression, il faut que, pendant plus de deux semaines au moins, la personne ait ressenti (ou que ses proches aient constaté chez elle) une perte d’intérêt et de plaisir, et une humeur triste ou désespérée de manière quasi permanente, qui affecte, voire entrave la vie quotidienne – sans que cet état soit lié à l’effet physiologique d’une substance ou d’une affection médicale. La dépression entraîne un fonctionnement au ralenti dans tous les registres de la vie quotidienne : relations affectives, activité intellectuelle, forme physique, mécanismes vitaux et corporels. Cela peut se manifester par certains des symptômes suivants : 

  • fatigue ;
  • hypersensibilité ;
  • tristesse ;
  • anxiété ;
  • troubles cognitifs et de l’attention ;
  • pensées négatives ;
  • pensées suicidaires ;
  • troubles du sommeil ;
  • troubles de l’appétit ;
  • troubles de la libido ;
  • troubles somatiques.

Quelles sont les aides pour se sortir d’une détresse psychologique ?

Une fois qu’on a reconnu et accepté que l’on a besoin d’aide, vers qui se tourner ? 

Pour David Friboulet, les hommes gays et bis doivent faire appel à des thérapeutes qui seront à l’aise avec leur orientation sexuelle, même si celle-ci n’est pas en lien direct avec la souffrance ressentie. 

Sur le choix du thérapeute, cela dépend évidemment des cas, comme l’explique David Friboulet : « Parler à un médecin généraliste, à un médecin de Centre gratuit d'information, de diagnostic et de dépistage (CeGIDD), à un psychologue ou un sexologue en CeGIDD peut parfois suffire à faire le point, pour savoir si on a besoin d’être soutenu davantage et orienté vers un accompagnement psychologique plus long. Des associations LGBT+ offrent aussi souvent des permanences psychologiques ponctuelles dans leurs locaux ou dans le milieu gay, comme l’Équipe nationale d’intervention en prévention et santé (Énipse). L’association Psy.gay.e.s peut aussi être une bonne source d’orientation pour trouver un psy safe. Et, si on ne va pas bien du tout, penser à une aide médicamenteuse et consulter un psychiatre peut diminuer la souffrance pour s’en sortir. »

Que faire pour aider quelqu’un qui souffre mentalement ?

Pour l’entourage, être confronté à la souffrance d’un proche n’est pas simple. Faut-il se contenter de l’écouter ? Le conseiller ? David Friboulet croit qu’il faut « surtout ne pas le juger ou lui dire ce qu’il faut faire. C’est ce qu’il y a de pire pour le faire fuir ou le faire se renfermer, estime–t-il. D’abord dire que l’on voit que la personne ne va pas bien, dire que l’on est là si elle souhaite échanger, et rester présent, garder le contact et prendre des nouvelles régulièrement pour enrayer l’isolement. »

Enfin, ajoute le psychothérapeute et sexologue, « il ne faut pas oublier que les gays ont été habitués très tôt à cacher les choses, à faire bonne figure ou à éviter des sujets qu’ils pensent gênants. Mais pour certains d’entre eux, ils ont aussi coupé le lien avec les ressources naturelles que sont la famille et les ami(e)s d’enfance, et ils ont besoin de leurs proches, cette nouvelle famille qu’ils se sont reconstituée. Et surtout, il s’agit de toujours prendre au sérieux des évocations suicidaires. Il existe des dispositifs régionaux de prévention du suicide ».

David Friboulet est psychothérapeute et sexologue. Il est également coordinateur du réseau psy LGBT+ friendly de l’Énipse.